Transfert de licences Ilok: comme un léger scandale?...

Les effets en AU, VST, MAS, AS, RTAS, AAX, TDM, DX, VS3, etc.
Dupont
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Message non lu par Dupont »

Pour Waves, perso, j'étais au courant, c'est d'ailleurs pour ça que j'ai arrêté depuis un bail d'utiliser leurs plugs (j'ai encore une licence native du Platinum) mais, venant de Sonnox, ça m'a un peu (désagréablement) surpris... Très peu d'autres fabricants pratiquent ce genre de "fee"...
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Nagoun
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Message non lu par Nagoun »

Probablement une logique commerciale anglo-saxonne non ?

J'ai récemment fait un transfert de licence pour un Nuendo "d'occasion" (allemand donc) qui s'est fait très rapidement et sans aucun frais.
Dupont
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Message non lu par Dupont »

Je ne crois pas puisque la majorité des fabricants (du moins ceux dont je possède les plugs) sont anglo-saxons et ne pratiquent pas ces méthodes.
D'ailleurs, j'ai aussi transféré une Revibe et une TL et même AVID ne pratique pas ça, c'est dire... :twisted:
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Labroue
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Message non lu par Labroue »

Bonsoir,

même si je n'ai aucun intérêt à soutenir une situation abusive de la part de certains auteurs de plug-ins, les différentes limitations ci-dessus exprimées me paraissent possibles, légales et sans anormalité au regard de notre droit.

Le problème est qu'un détenteur d'une licence d'utilisation de logiciel, s'identifie trop souvent à une personne qui aurait achetée un bien corporel. Cette identification nous conduit sur le chemin manifeste des erreurs.

En premier lieu il n'est pas correct de dire que l'on achète un plug-ins. Il est plus approprié de dire que l'on obtient un droit d'utilisation dans des conditions limitées d'exercice de ce plug-in. Ces conditions peuvent être limitées dans le temps (pour quelques jours, un mois, un an, 5 ans ou sans aucune limite), dans l'espace (utilisable en Europe ou dans tous les pays) et pour tel usage (mixage de la musique, acticité commerciale ou non, etc.).

C'est à l'auteur du logiciel de déterminer les restrictions des conditions d'exercice de la licence. Les auteurs les plus généreux offrent tout, les autres peuvent limiter les conditions d'exercice. Ils ne peuvent offrir à leur utilisateur aucune limite, que si cela est expressément exprimé dans le contrat d'utilisation.

Le droit d'utilisation du logiciel s'acquiert "intuitu personae", c'est-à-dire qu'il est accordé à une personne vivante et clairement nommée. De cette disposition nous ne pouvons pas en déduire que le licencié pourra à son tour céder son droit. Ce n'est pas un bien corporel dont il s'agit.

La licence n'est qu'un mécanisme juridique pour que l'auteur puisse facilement accorder des licences en masse, sans avoir à signer un contrat individuel avec chacun des utilisateurs. Cela n'enlève rien au caractère personnel du droit d'utilisation.

Certains auteurs de logiciel admettent néanmoins que le licencié peut à son tour transmettre la licence à quelqu'un d'autre, à certaines conditions (payantes ou gratuites).

Donc il ne faut pas s'étonner que l'on ne puisse pas céder sans condition une licence à un des ses amis. Je parle de "céder" car le terme "vendre" serait totalement inapproprié.

Tout cela est exprimé dans les conditions d'exercice de la licence d'utilisation du logiciel.

Ce dont il faut bien se rappeller, c'est que l'on ne détient aucun droit de propriété envers les plug-ins que l'on utilisent contractuellement sur nos stations de travail. Et ceci à l'inverse du matériel hardware qu'ils sont censés émuler.

C'est exactement comme pour un disque de chanson : si on a le droit d'écouter un album, une chanson, ce n'est pas pour cela que l'on est propriétaire de la chanson.
certains fabricants comme SONNOX doivent d'abord approuver le transfert (on se demande bien en quoi ça les regarde)
Bien si justement, plus qu'approuver la transaction, ils pourront autoriser ou pas le transfert. Ce sont eux les propriétaires. Le propriétaire est en droit de fixer les conditions se rapportant à son bien même incorporel.

Bien amicalement.
Dupont
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Message non lu par Dupont »

Labroue a écrit : C'est exactement comme pour un disque de chanson : si on a le droit d'écouter un album, une chanson, ce n'est pas pour cela que l'on est propriétaire de la chanson.
Non et je n'ai d'ailleurs jamais estimé être propriétaire du code (programmation) du plugin, en revanche, pour reprendre ton analogie, il me semble qu'on a tout à fait le droit de revendre un CD dont on ne veut plus à une tierce personne ou même à un magasin (Gibert Jeune par exemple).

Je ne suis pas du tout d'accord avec ton approche du "dématérialisé".
Ce n'est pas parceque c'est "dématérialisé" qu'on n'a aucun droit dessus en contrepartie des obligations.
Je ne vois pas pourquoi, sous prétexte que c'est virtuel, on perdrait des droits acquis depuis des siècles...

L'acheteur d'une licence de plug a des obligations (ne pas le cracker pour le distribuer, ne pas l'utiliser sur plusieurs postes à la fois, etc...) mais il a aussi des droits, dont celui d'en revendre la licence.

Et d'ailleurs, preuve en est qu'il n'y a aucune question de droit ou de propriété dans tout ça, un billet de 60€ et hop, les limitations disparaissent comme par magie... :roll:
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Labroue
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Message non lu par Labroue »

Je ne connaissais ta lecture inventive de la loi... elle est formidablement poétique et j'imagine qu'elle pourraient inspirer le législateur de demain en quête de nouveaux chemins.

Je ne parle pas de "dématérialisation" ni de "virtuel", seulement de bien incorporel issu de l'œuvre de l'esprit, tel un logiciel par exemple. Le terme "bien incorporel" est un terme juridique, celui de dématérialisation ne l'est pas (et aussi virtuel). On a donc pas le même régime applicable. Faut etre précis dans les termes, bien précis.

Je me permets de citer un résumé (dont je n'en suis pas l'auteur) :

Le titulaire des droits patrimoniaux d'un logiciel a la possibilité d'en concéder l'exercice à un tiers. Dans cette hypothèse il va définir par le biais d'un document contractuel dénommé "licence", l'étendue des droits qu'il concède au licencié. Cette licence peut ainsi aller de la simple concession du droit d'usage du logiciel sur un seul ordinateur et pour une durée limitée à des fins d'évaluation, à une licence très large permettant à celui qui en bénéficie de reproduire le logiciel et de le distribuer librement dans le commerce. Toutes les restrictions sont possibles sous réserve des dispositions de l'article L.122-6 -1 du CPI et notamment du droit pour le licencié de réaliser une copie de sauvegarde du logiciel.

Dans le cas des plug-ins l'utilisateur licencié peut bénéficier de l’interopérabilité, ce qui me semble être un avantage considérable.
il me semble qu'on a tout à fait le droit de revendre un CD dont on ne veut plus à une tierce personne ou même à un magasin
D'usage, oui. Un auteur, un compositeur pointilleux qui serait en dehors du système traditionnel pourrait s'y opposer.

Bien amicalement.
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YuHirà
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Message non lu par YuHirà »

Bonsoir,

Labroue tu as parfaitement raison sur ton analyse sauf sur un point (qui n'a pas une grande importance, je l'admets).
Le droit d'utilisation du logiciel s'acquiert "intuitu personae", c'est-à-dire qu'il est accordé à une personne vivante et clairement nommée.
Je comprends ce que tu veux dire par là mais une licence de ce genre n'est pas stricto sensu un contrat intuitu personae. Un contrat intuitu personae est un contrat dont la cause de l'obligation est liée à la personne même du concontractant: c'est parce que le cocontractant est une personne particulière et irremplaçable que ce contrat est conclu. Le contrat de mariage ou le contrat d'embauche d'un artiste reconnu est un contrat intuitu personae, mais pas ce type de licence: la raison principale qui fait que Waves ou Sonnox livre le logiciel et sa licence d'utilisation n'est pas liée à la personne elle-même (l'entreprise ne te cède pas la licence parce que tu es précisément Monsieur Machin truc) mais à la contrepartie financière. L'identité de la personne n'est pas ici une qualité substantielle, comme peut l'être la jolie femme que tu vas épouser ou le grand artiste de rock que tu veux produire.

L'incessibilité de la licence est une simple obligation contractuelle aménageant les conditions de la licence, et ce afin de contrôler au mieux l'utilisation du logiciel ainsi concédé. On trouve également ce genre de clause en droit d'auteur (on interdit à un distributeur audiovisuel de sous distribuer un film par exemple).
Non et je n'ai d'ailleurs jamais estimé être propriétaire du code (programmation) du plugin, en revanche, pour reprendre ton analogie, il me semble qu'on a tout à fait le droit de revendre un CD dont on ne veut plus à une tierce personne ou même à un magasin (Gibert Jeune par exemple).
Labroue a raison! Lorsqu'on revend un CD on revend la propriété du support mais pas la propriété de la musique dont on ne transfère que la jouissance. Or l'auteur a le monopole des droits patrimoniaux qu'il concède: il est donc libre d'aménager à sa guise les conditions de jouissance de ses droits. Par conséquent, si un auteur décide de vendre un CD à une personne en interdisant la revente, il en a le droit. C'est notamment le cas des CD promotionnels offerts par les labels aux journalistes, qui sont explicitement interdits à la vente: tout transfert de propriété à titre onéreux devient de facto une contrefaçon. C'est exactement ce qui se passe ici avec la licence dont on parle.

En ce qui concerne le problème initial, je pense que c'est effectivement un prix très élevé. En théorie, si la licence que tu as accepté autorise le transfert de licence, sans condition suspensive, le propriétaire du logiciel n'est pas fondé à te demander de l'argent pour ce transfert. Mais si la licence interdit ce transfert ou conditionne ce transfert à leur accord et/ou au paiement d'une contrepartie, ils ont hélas parfaitement le droit de subordonner le transfert au paiement d'un certain prix.

Juste pour information, le droit de suite lié au transfert d’œuvres d'art fonctionne exactement de la même manière. Si ce droit de suite n'existait pas, le tableau d'un peintre célèbre pourrait être cédé à des collectionneurs éternellement et prendre de la valeur, sans que son auteur ne touche jamais rien de plus que le montant qu'il a reçu initialement: ce serait un peu triste dans la mesure où c'est précisément lors de ces ventes successives que le tableau acquiert sa valeur.

NB: désolé pour ce long post :-)
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Labroue
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Message non lu par Labroue »

Oui oui, vous avez parfaitement raison sur ce point où j'ai fait une confusion : ce n'est pas stricto sensus un contrat intuitu personae en cas de licence. Je faisais un confusion entre le contrat de licence de brevet qui lui peut avoir un caractère intuitu personae et le contrat de licence de droit patrimoniaux (du droit d'auteur) qui n'a pas ce caractère.

La technique juridique est parfois fort complexe, et comme je ne pratique pas tous les jours (le studio motive beaucoup plus en ce moment), quelques erreurs peuvent s'infiltrer.

En tout cas merci beaucoup pour vos explications précises et très complémentaires.

Bien amicalement
Dernière modification par Labroue le 11 nov. 2011, 22:16, modifié 2 fois.
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YuHirà
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Message non lu par YuHirà »

Labroue a écrit :Oui oui, vous avez parfaitement raison sur ce point que ce n'est pas stricto sensus un contrat intuitu personae en cas de licence. Je faisais un confusion entre le contrat de licence de brevet qui lui peut avoir un caractère intuitu personae et le contrat de licence de droit patrimoniaux (droit d'auteur) qui n'a pas ce caractère.

La technique juridique est parfois fort complexe, et comme je ne pratique pas tous les jours (le studio motive beaucoup plus en ce moment), quelques erreurs peuvent s'infiltrer.

En tout cas merci beaucoup pour vos explications précises et très complémentaires.
Merci bien, c'était un plaisir, mais on peut se tutoyer :lol: Je ne suis pas bien vieux :lol:

Cela dit, un contrat de licence de droits patrimoniaux peut parfaitement être intuitu personae également :lol: Si on t'octroie une licence parce que tu es Alan Parsons par exemple. Dans ce cas, forcément, l'incessibilité est sous-entendue et automatique :D
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Labroue
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Message non lu par Labroue »

Pas de problème. J'ai écrit "vous" par réflexe.

Sur ce terme "licence" le droit français n'a pas exactement les mêmes mécanismes que le droit anglo-saxon.

---

Si chaque fois qu'on voudrait utiliser un logiciel, on devait demander l'autorisation à son auteur, on en finirais pas... Le mécanisme de la licence est assez génial. Pareil pour les débits de boisson : imaginez que chaque fois qu'on sert de l'alcool dans un bar le tenancier devait demander une autorisation au préfet.

Bien amicalement.
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