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[Film] La vie moderne

Publié : 11 nov. 2008, 01:07
par Aroy-D
Je suis content, je viens de voir un très grand film.
Dépéchez vous avant qu'il ne soit plus en salle.
Et bravo au monsieur qui l'a mixé, j'espère qu'il pourra nous en dire quelques mots.
Image

Re: [film] La vie moderne

Publié : 11 nov. 2008, 01:40
par Benoit T.
A voir également dans les cahiers du cinéma d'octobre je crois. Un bon article sur ce film, notamment sur les notions techniques (interview de Claudine Nougarets par exemple).

Publié : 18 nov. 2008, 09:06
par 23bertrand
très beau film à écouter...

on aimerait connaître la config...

Publié : 22 nov. 2008, 00:39
par CN
comme je suis contente de lire un spectateur content je me permet de vous répondre
le mixeur est Gérard Lamps est la chef opératrice est moi même Claudine Nougaret c'est un film de son direct
je vous joins la chronique que j'ai écrite sur le film" la vie moderne"pour l'émission l'Aventura de Laure Adler diffusée sur France culture le mercredi soir
Ce n'est pas technique mais cela éclaire sur la démarche du film.
Avec Gérard nous venons de finir " donner la parole" un film diffusé de 33 minutes diffusé dans l'exposition Terre natale à la fondation cartier pour l'art contemporain jusqu'au 15 mars 2009 ce film est diffusé en 24 bits numérique sans Dolby ou autre compression et projetté sur un écran de 100 mètres carré. nous conseillons aux oreilles sensibles de venir se régaler.

Le son et l’argent
La particularité de La vie moderne est que je suis la productrice du film en même temps que la preneuse de son ce qui m’a permit de suivre toutes les étapes de la fabrication du film. Raymond Depardon et moi-même avons pu décidé d’attribuer l’argent à tel ou tel poste sans intervention extérieure .
Pour l’image, on a choisi de tourner avec un prototype de caméra et de faire un traitement de l’image innovateur en 4K. Pour le son j’ai pu déterminer les étapes de fabrication avec la plus grande qualité technique disponible en France aujourd’hui
Notre démarche à consisté pour l‘image et le son à rechercher la profondeur de champ et tenter d’obtenir la transparence du signal sonore sur toute la chaine de fabrication.

Il y a de l’épure dans la bande son de la vie moderne
Depuis 1O ans nous avons filmé et enregistré les mêmes personnes dans les mêmes lieux. Les mêmes troupeaux de vache et de mouton les mêmes chiens les mêmes poules et les mêmes tracteurs
L’attirance pour un son est du même ressort que l’attirance pour une image.
J’ai pu favoriser par des inclinaisons toutes personnelles certains bruits plus que d’autre avec un avantage énorme sur d’autre ingénieur du son qui est le temps. 1O ans d’enregistrement d’ambiance de nature, d’habitations, de voix c’est une grande chance. Bien que l’on n’est pas utilisé les trois quarts des sons d’ambiances que j’ai pu faire on peut dire que j’ai été immergé dans le sujet. Les outils ont changés et ce sont perfectionnés en 1O ANS
Du four au moulin nous avons tenté d’apporter le même soin avec toujours en tête que quand on filme des gens en situation de précarité il ne faut pas rajouter de la misère à la misère. Pour que le spectateur veuille s’intéresser à ces sans voix, il faut qu’il est confiance en son propre jugement de ce qu’il entend et de ce qu’il voit pour qu’il est confiance pour cela il nous faut de la qualité visuelle et sonore il ne faut pas tricher !.
Le même film tourné à la va vite un micro sur la caméra avec un son difficilement audible et une image approximative ne permettrait pas au spectateur de connaître et de s’identifier aux personnages.

La magie du son direct s’installe dans le temps de l’écoute
Le son est plus lent que l’image (340 mètres par secondes dans l’air pour 300 000 kilomètres secondes pour la lumiere).
Le son n’est audible que dans son tempo. Si l’image est rapide on ne peut pas entendre le son, on ne peut que le percevoir.
Les cadres frontaux de la vie moderne et la grandeur de l’image scope laisse tout loisir au spectateur de percevoir des légers bruits qu’il ne discernerait peut être pas avec un autre montage.
Le temps de la rencontre installe des silences et des hésitations et ouvre les oreilles des spectateurs de la salle de cinéma sur des petits bruits ordinaires : cafetières du petit déjeuner tic tac de la vieille horloge, machine à laver, frigidaire passage d’une personne off
Pendant que j’enregistre Raymond qui parle avec les paysans au premier plan simultanément j’enregistre en arrière plan les sons du paysage ou du décor intérieur
Je fais une deuxième prise de son au deuxième plan avec un dispositif qui permet d’entendre les bruits sans perturber la conversation
Ces bruits créent la géographie et donne de la profondeur au plan, ils sont fondateurs au même titre que le paysage. On les retrouve ensuite dans la salle de cinéma bien réglée sur des plans à priori anodin par exemple : à droite le son de la machine à laver qui sort de la fenêtre et les bruits de pas d’un chien qui traverse le champs de la camera de droite à gauche pour aller laper dans une bassine à gauche. Cette spatialisation n’est pas recrée artificiellement par la suite elle est telle que nous l’avons entendue toute simple.

L’illustration sonore n’est pas notre histoire sonore.
Dans le film la vie moderne très peu de sons sont rajoutés, nous avons tentés de ne pas reproduire les poncifs de l’illustration sonore comme celui d’entendre un coq des que l’on voit un bâtiment de ferme
En réalité il y en a toujours des coqs et des poules et des pigeons, mais le temps du film n’est pas le temps de la réalité et monter un événement sonore donne du sens à la narration du film. Le coq est glorieux arrogant il n’est pas un de nos personnages qui sont plus tôt des taiseux forcément timides.
Dans le son Il y a ce que j’appellerai des cartes postales que l’on retrouve souvent dans les films, une vue de village en France et le son du clocher de l’église .Une image dans le Maghreb et le son du muezzin. Une annonce d’arrivée d’avion sur une vue d’aéroport. Tous ces sons sont souvent rajoutés au montage puis mixés et renforcent les clichés sonores ils brouillent la narration ils sont pléonastiques et redondant l’image. Il me semble plus intéressant de placer un seul bon son que de multiplier les images sonores par exemple le bruit du couteau qu’aiguise Raymond Privat sue la meule tend l’attention du spectateur à l’ouerture du film tout seul ce son raconte la tension qui peut régner dans la ferme.

Le son est un plaisir difficile à satisfaire
Les moutons qui rentrent et qui sortent j’en ai enregistré des kilomètres en mono en stéréo
c’est un son plein que l’on peut difficilement rajouter a l’image sans donner un sens très fort. Sens temporel , narratif ou géographique.
Mais j’en ai enregistré beaucoup on ne sait jamais.


Musique
Dans la vie moderne il y a la parole la langue des ambiances et très peu de musique sauf deux contrepoint de Gabriel Fauré qui se mélange formidablement bien à la prise du son direct.
Un extrait en ouverture qui rappelle les deux premiers films et un autre sur une route puis le morceau intégral en générique de fin. Ces trois interventions musicales sont je dirais mélancoliques et très Française elles reflètent très bien le sentiment de profond respect et d’émotion que nous avons en voyant le mode de vie de ces paysans si loin de notre vie de citadin, cette musique est intemporelle.

Publié : 22 nov. 2008, 01:13
par Elie
Tout le monde me parle de ce film, décidément je vais aller le voir.

Du coup j'aurais bien aimé aussi connaître la config de tournage avant de le voir, histoire de ne pas trop focaliser sur la question.

Publié : 22 nov. 2008, 02:16
par Aroy-D
olala...
merci, et encore merci de prendre un peu de votre temps pour nous faire partager votre expérience...
j'ai vraiment été très ému par ce film qui est beau à voir, à entendre, à penser, et bien plus encore.
Continuez encore à faire des films

Mes amitiés, ainsi qu'à Monsieur Depardon.
Julien





(comment c'est bien internet des fois...)

Publié : 22 nov. 2008, 13:39
par 23bertrand
Aroy-D a écrit :olala...
merci, et encore merci de prendre un peu de votre temps pour nous faire partager votre expérience...
j'ai vraiment été très ému par ce film qui est beau à voire, à entendre, à penser, et bien plus encore.
Continuez encore à faire des films

Mes amitiés, ainsi qu'à Monsieur Depardon.
Julien





(comment c'est bien internet des fois...)
je rejoins aroy dans son plaisir et ses remerciements...


(comment c'est bien internet des fois...)

edit : http://palmeraieetdesert.fr/presse/viem ... OSITIF.pdf

article + itw de CN & RD

Publié : 23 nov. 2008, 04:10
par Elie

Publié : 23 nov. 2008, 12:38
par dederam
Bonjour à vous tous,

Je m'en excuse d'avance, mais je ne serai me retenir de flatter Claudine Nougaret pour son travail. Je vous écoute et vous lie depuis un petit moment et je dois dire que je suis en admiration devant votre disponibilité auditive.

La vie moderne est pour moi une réussite; touchant mais pas patos, drôle mais pas moqueur...

une petite question (sans grand intérêt) : Dans le film une dame au regard vif vous propose une tasse de café qui est entrain de refroidir. A ce moment la qu'est ce qui vous retient le plus pour ne pas faire comme Raymond Depardon (boire sa tasse), votre rôle de productrice, votre professionnalisme de sondière, ou tout simplement que vous n'aimez pas le café.

Sur ceux, une bonne continuation à SDO.

Publié : 23 nov. 2008, 13:32
par GérardLamps
Bonjour,
Difficile de boire un café quand on à la perche dans les mains !!!!
Amicalement.
GL