ma position démissionnaire de la commission audioviuelle de la SACEM
- Brotools
- Donateur en Argent
- Messages : 1905
- Inscription : 28 avr. 2012, 18:17
- Localisation : paris
- Contact :
Re: ma position démissionnaire de la commission audioviuelle de la SACEM
Bien sûr, je n'ai pas dit que compsoer pour une librairie était un jeu d'enfant, je pense juste que, généralement, il y a plus de critères à respecter pour de la musique à l'image (synchro, différents interlocuteurs, deadline plus serrées, anticipation du mélange avec le son et les directs...). Et ce que tu dis pour la musique "de stock" (demandes souvent pointues) vaut aussi pour la musique à l'image.
Re: ma position démissionnaire de la commission audioviuelle de la SACEM
Il faut peut-être que je prenne un exemple plus concret
D'un côté, j'ai un documentaire à faire où la deadline assez souple (un mois par exemple), sans aucun point de synchro et sans autre interlocuteur que le réalisateur. Exemple assez courant. Surtout que la décision de la SACEM porte sur le coefficient appliqué au documentaire, pas à la fiction où la synchro est beaucoup plus courante et les producteurs plus impliqués
De l'autre côté, j'ai des morceaux d'édition avec une deadline très serrée (avec l'un de mes éditeurs, si tu ne rends pas dans la semaine, tu as souvent travaillé pour rien) et plusieurs interlocuteurs dans la boîte qui valident. Ces morceaux d'édition doivent être livrés sous 4 versions: une version complète, une version sans thème, une version 30 secondes, une version 60 secondes. Evidemment, tu dois tout faire sur le morceau de A à Z et la pression est beaucoup plus forte puisque que tu n'as aucun débouché d'assuré: ton morceau doit donc être bon pour sortir du lot alors que dans le documentaire, une fois sur le projet, tu n'es plus en compétition.
Peut-on dire dans ce cas que le premier projet sera plus contraignant que le second? Rien n'est aussi sûr
Je pense donc sincèrement que dans le cadre d'un documentaire, on ne peut pas dire de manière définitive que composer à l'image soit infiniment plus difficile et plus contraignant que l'édition à l'heure actuelle. C'est vrai dans beaucoup de cas, bien entendu, mais ce n'est pas aussi évident (ta première phrase laissait entendre cela )
D'un côté, j'ai un documentaire à faire où la deadline assez souple (un mois par exemple), sans aucun point de synchro et sans autre interlocuteur que le réalisateur. Exemple assez courant. Surtout que la décision de la SACEM porte sur le coefficient appliqué au documentaire, pas à la fiction où la synchro est beaucoup plus courante et les producteurs plus impliqués
De l'autre côté, j'ai des morceaux d'édition avec une deadline très serrée (avec l'un de mes éditeurs, si tu ne rends pas dans la semaine, tu as souvent travaillé pour rien) et plusieurs interlocuteurs dans la boîte qui valident. Ces morceaux d'édition doivent être livrés sous 4 versions: une version complète, une version sans thème, une version 30 secondes, une version 60 secondes. Evidemment, tu dois tout faire sur le morceau de A à Z et la pression est beaucoup plus forte puisque que tu n'as aucun débouché d'assuré: ton morceau doit donc être bon pour sortir du lot alors que dans le documentaire, une fois sur le projet, tu n'es plus en compétition.
Peut-on dire dans ce cas que le premier projet sera plus contraignant que le second? Rien n'est aussi sûr
Je pense donc sincèrement que dans le cadre d'un documentaire, on ne peut pas dire de manière définitive que composer à l'image soit infiniment plus difficile et plus contraignant que l'édition à l'heure actuelle. C'est vrai dans beaucoup de cas, bien entendu, mais ce n'est pas aussi évident (ta première phrase laissait entendre cela )
- Brotools
- Donateur en Argent
- Messages : 1905
- Inscription : 28 avr. 2012, 18:17
- Localisation : paris
- Contact :
Re: ma position démissionnaire de la commission audioviuelle de la SACEM
Oui, je comprends, c'est vrai que la synchro est bcp plus "critique" en fiction qu'en documentaire, tu as raison.
- zikayan
- Donateur en Bronze
- Messages : 1001
- Inscription : 06 sept. 2004, 20:02
- Localisation : Lille
- Contact :
Re: ma position démissionnaire de la commission audioviuelle de la SACEM
Histoire d'élargir un peu le débat, on peut voir la question autrement que par la différence de qualité ou de travail demandé par du catalogue ou de la commande à l'image - quoiqu'en ce qui me concerne, je trouve la commande à l'image beaucoup plus contraignante et potentiellement plus cruelle que le catalogue, que ce soit en documentaire ou en fiction.
Depuis pas mal de temps, le CNC, entre autres, essaye de clarifier les choses entre ce qui relève du genre télévisuel "documentaire de création", et du genre "magazine" ou "reportage". Entre autre pour valoriser la création, aider la production les programmes plus fragiles, et dans une certaine mesure pour minorer les aides que peuvent recevoir des chefs d'œuvres façon "Les Ch'tis font du ski à Hollywood".
L'année dernière, le CNC a donc introduit de nouveaux coefficients de valorisation pour ses aides au documentaire de création, avec des critères non subjectifs, et notamment avec une valorisation des films passant commande d'une musique originale (qui doit être assortie d'un montant minimum de 2000,00 euros de prime de commande au compositeur, hors frais de production).
Evidemment, çe ne va pas empêcher de faire des musiques originales toutes pourries, et ça ne changera rien non plus au fait qu'il y a de très belles choses dans les catalogues de musique au mètre, mais il est tout de même frappant de constater que la Sacem va exactement à l'envers de ces décisions, en décidant de son côté qu'il est plus simple de considérer que documentaire de création et reportage, c'est kifkif.
Ce n'est déjà pas très clair dans la tête du grand public, mais un documentaire, c'est un point de vue d'auteur, un reportage c'est un compte rendu de journaliste. La musique, si elle a un rôle à y jouer, n'est pas utilisée de la même manière dans les deux cas.
Depuis pas mal de temps, le CNC, entre autres, essaye de clarifier les choses entre ce qui relève du genre télévisuel "documentaire de création", et du genre "magazine" ou "reportage". Entre autre pour valoriser la création, aider la production les programmes plus fragiles, et dans une certaine mesure pour minorer les aides que peuvent recevoir des chefs d'œuvres façon "Les Ch'tis font du ski à Hollywood".
L'année dernière, le CNC a donc introduit de nouveaux coefficients de valorisation pour ses aides au documentaire de création, avec des critères non subjectifs, et notamment avec une valorisation des films passant commande d'une musique originale (qui doit être assortie d'un montant minimum de 2000,00 euros de prime de commande au compositeur, hors frais de production).
Evidemment, çe ne va pas empêcher de faire des musiques originales toutes pourries, et ça ne changera rien non plus au fait qu'il y a de très belles choses dans les catalogues de musique au mètre, mais il est tout de même frappant de constater que la Sacem va exactement à l'envers de ces décisions, en décidant de son côté qu'il est plus simple de considérer que documentaire de création et reportage, c'est kifkif.
Ce n'est déjà pas très clair dans la tête du grand public, mais un documentaire, c'est un point de vue d'auteur, un reportage c'est un compte rendu de journaliste. La musique, si elle a un rôle à y jouer, n'est pas utilisée de la même manière dans les deux cas.
Dans quel DD j'erre...
- Dorian
- Fondateur
- Messages : 14363
- Inscription : 17 juin 2003, 18:21
- Localisation : Clamart
- Contact :
Re: ma position démissionnaire de la commission audioviuelle de la SACEM
De mon point de vue, et sans parler de la valeur artistique intrinsèque d'une musique qu'elle soit originale ou de catalogue, il y a quand même une sacrée différence d'investissement (financier, et humain), et donc de valeur. Je vais prendre deux exemples :
- Les plans de coupe en stock shot sur des banques d'images/vidéos, et les plans de coupe tournés spécifiquement par l'équipe de tournage ou une seconde équipe.
- Des sons de sonothèques commerciales, et des sons seuls enregistrés spécifiquement pour le projet par l'équipe de tournage ou une seconde équipe.
C'est à mon sens la même chose ici, et il me parait normal qu'un coefficient différent soit appliqué.
Si ce n'est pas le cas, on tire tout un pan de certains métiers vers le bas, pour des raisons purement économiques, et ça c'est vilain je trouve, et ça n'amène rien de bon.
Je ne parle même pas de l'annihilation du rapport humain entre réalisateur et compositeur.
My 2 cents.
- Les plans de coupe en stock shot sur des banques d'images/vidéos, et les plans de coupe tournés spécifiquement par l'équipe de tournage ou une seconde équipe.
- Des sons de sonothèques commerciales, et des sons seuls enregistrés spécifiquement pour le projet par l'équipe de tournage ou une seconde équipe.
C'est à mon sens la même chose ici, et il me parait normal qu'un coefficient différent soit appliqué.
Si ce n'est pas le cas, on tire tout un pan de certains métiers vers le bas, pour des raisons purement économiques, et ça c'est vilain je trouve, et ça n'amène rien de bon.
Je ne parle même pas de l'annihilation du rapport humain entre réalisateur et compositeur.
My 2 cents.
Re: ma position démissionnaire de la commission audioviuelle de la SACEM
Bonjour,
merci beaucoup d'avoir ouvert le débat. Je comprends pleinement vos arguments respectifs.
Néanmoins, je m'enracine dans l'idée que le droit d'exploitation (patrimonial) d'une oeuvre musicale est calculée en fonction de son exploitation et pas directement en fonction de ses conditions de création : il s’agit du droit exclusif d’exploiter l’œuvre et de recevoir une rémunération pour cette exploitation.
Or, dans le cadre de la production d'un film, le producteur qui désire une musique originale, passe avec le compositeur un "contrat de commande" qui aura pour objet la réalisation d'une musique musicale spécialement composée pour le film. En conséquence, on distingue la somme perçue au titre de la commande qui correspond à la réalisation de l’œuvre musicale et les sommes perçues pour son exploitation (ces dernières en général versées par la Sacem).
Ce contrat de commande introduit la prime d’inédit, prime de commande ou prime d’écriture, qui vient rémunérer la commande et la réalisation de l’œuvre musicale pour des besoins particuliers définis par le réalisateur et commandés par le producteur du film.
Par ailleurs, ce qui prouve l'indépendance des deux notions, en sus de sa prime d’inédit, le compositeur peut également percevoir du producteur du film une avance sur les sommes qui lui reviendront au titre des recettes d’exploitation de sa composition.
En tant que juriste, en l'état actuel de la loi, je trouve qu'il n'était pas correct de modeler ainsi le droit d'exploitation d'une oeuvre musicale en fonction de l'existence d'un contrat de commande ou pas. C'est faire l'amalgame de deux notions de droit bien différentes dans mon esprit. Je conçois que le compositeur d'une oeuvre musicale (musique originale) pour un film ait droit au bénéfice financier d'un contrat de commande, sans interagir sur ses droits d'exploitation.
--
On pourrait même s'amuser à plaider la thèse inverse et extrême :
c'est en l'espèce, parce qu'il s'agit une oeuvre de commande, que parce que le compositeur intervient sous la tutelle intellectuelle et constante d'un réalisateur déterminé, que l'aspect personnel d'une oeuvre musicale pourrait être remis en question, entrainant une modification des droits d'exploitation.
Néanmoins, la jurisprudence défend encore pleinement la qualité d'auteur au compositeur d'une musique originale agissant sous la tutelle d'un réalisateur, la présomption d'auteur demeurant très fragile (j'ai plusieurs décisions de la Cour de Cassation et des TGI en ce sens). Le problème est plus épineux, quand le réalisateur donne "des directives précises" et agit par lui-même sur la composition.
---
Un dernier point, nous constatons beaucoup d'incompréhension et de mauvaise interprétation du mot "original".
Quand on parle de musique originale pour un film, ce n'est pas un terme de droit qui est employé ici. Si en revanche, je parle d'oeuvre originale, je fais allusion à une notion de droit bien précise qui parfois est totalement contraire à la précédente : une musique originale n'est par forcément une oeuvre originale pour son compositeur.
Une œuvre est originale quand elle contient l'empreinte personnelle de son auteur (Cour de Cassation 1979). Or une musique originale est composée en fonction des directives d'un réalisateur...
Il faut se méfier des mots seuls, car dans le langage courant, on peut faire beaucoup de confusions.
Bien amicalement
merci beaucoup d'avoir ouvert le débat. Je comprends pleinement vos arguments respectifs.
Néanmoins, je m'enracine dans l'idée que le droit d'exploitation (patrimonial) d'une oeuvre musicale est calculée en fonction de son exploitation et pas directement en fonction de ses conditions de création : il s’agit du droit exclusif d’exploiter l’œuvre et de recevoir une rémunération pour cette exploitation.
Or, dans le cadre de la production d'un film, le producteur qui désire une musique originale, passe avec le compositeur un "contrat de commande" qui aura pour objet la réalisation d'une musique musicale spécialement composée pour le film. En conséquence, on distingue la somme perçue au titre de la commande qui correspond à la réalisation de l’œuvre musicale et les sommes perçues pour son exploitation (ces dernières en général versées par la Sacem).
Ce contrat de commande introduit la prime d’inédit, prime de commande ou prime d’écriture, qui vient rémunérer la commande et la réalisation de l’œuvre musicale pour des besoins particuliers définis par le réalisateur et commandés par le producteur du film.
Par ailleurs, ce qui prouve l'indépendance des deux notions, en sus de sa prime d’inédit, le compositeur peut également percevoir du producteur du film une avance sur les sommes qui lui reviendront au titre des recettes d’exploitation de sa composition.
En tant que juriste, en l'état actuel de la loi, je trouve qu'il n'était pas correct de modeler ainsi le droit d'exploitation d'une oeuvre musicale en fonction de l'existence d'un contrat de commande ou pas. C'est faire l'amalgame de deux notions de droit bien différentes dans mon esprit. Je conçois que le compositeur d'une oeuvre musicale (musique originale) pour un film ait droit au bénéfice financier d'un contrat de commande, sans interagir sur ses droits d'exploitation.
--
On pourrait même s'amuser à plaider la thèse inverse et extrême :
c'est en l'espèce, parce qu'il s'agit une oeuvre de commande, que parce que le compositeur intervient sous la tutelle intellectuelle et constante d'un réalisateur déterminé, que l'aspect personnel d'une oeuvre musicale pourrait être remis en question, entrainant une modification des droits d'exploitation.
Néanmoins, la jurisprudence défend encore pleinement la qualité d'auteur au compositeur d'une musique originale agissant sous la tutelle d'un réalisateur, la présomption d'auteur demeurant très fragile (j'ai plusieurs décisions de la Cour de Cassation et des TGI en ce sens). Le problème est plus épineux, quand le réalisateur donne "des directives précises" et agit par lui-même sur la composition.
---
Un dernier point, nous constatons beaucoup d'incompréhension et de mauvaise interprétation du mot "original".
Quand on parle de musique originale pour un film, ce n'est pas un terme de droit qui est employé ici. Si en revanche, je parle d'oeuvre originale, je fais allusion à une notion de droit bien précise qui parfois est totalement contraire à la précédente : une musique originale n'est par forcément une oeuvre originale pour son compositeur.
Une œuvre est originale quand elle contient l'empreinte personnelle de son auteur (Cour de Cassation 1979). Or une musique originale est composée en fonction des directives d'un réalisateur...
Il faut se méfier des mots seuls, car dans le langage courant, on peut faire beaucoup de confusions.
Bien amicalement